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VARSOVIE 2024

Liliana Torres • Réalisatrice de Mamífera

“L'absence de références positives de femmes qui ne veulent pas être mères contribue à la stigmatisation”

par 

- La réalisatrice espagnole nous parle de son nouveau film, qui s'intéresse à l'autonomie physique, reproductive et sociale autour du sujet des femmes qui ne veulent pas devenir mères

Liliana Torres • Réalisatrice de Mamífera

La réalisatrice espagnole Liliana Torres nous parle de son nouveau film, Mamífera [+lire aussi :
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interview : Liliana Torres
fiche film
]
, qui s'intéresse à l’autonomie corporelle, reproductive et sociale à travers le cas des femmes qui ne veulent pas être mères. Le film, qui a fait sa première mondiale à SXSW (où son actrice principale, Maria Rodríguez Soto, a remporté un prix spécial du jury pour son interprétation) est à présent en pleine tournée des festivals, après être passé par San Sebastian, dans la section Made in Spain, São Paulo et Varsovie.

Cineuropa : Mamífera aborde des sujets très personnels et complexes liés à la maternité et l’identité. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’explorer ces questions dans le film ?
Liliana Torres :
Mamífera est né d’une situation personnelle qui devient de plus en plus sociale à mesure que je grandis. J’ai toujours su que je ne voulais pas être mère, et au fil des ans, cette volonté maintenue a été remise en cause et vue comme suspicieuse. Le manque de références positives ou normalisées de femmes qui ne veulent pas être mères, dans la littérature mais surtout au cinéma, contribue à cette stigmatisation, a fortiori quand on ose dépeindre les femmes qui ne sont pas mères comme des figures clichés : "la nana amère qui déteste les enfants", "la cadre sup ambitieuse masculinisée", etc. Le sentiment de culpabilité personnelle qui accompagne des questions comme "Est-ce que j’ai un problème ?", "Ai-je été traumatisée ?", "Suis-je antinaturelle ?" s'est transformé peu à peu en besoin de trouver des explications sociologiques à cette stigmatisation. C'est de cette enquête et cette expérience personnelle qu'est né Mamífera

Votre film est passé par différents festivals internationaux, comme SXSW ou San Sebastian, et le voilà qui va jouer à Sao Paulo et à Varsovie. Quelle a été la réaction du public et qu'espérez-vous des audiences qui vont bientôt découvrir le film, en particulier le public ibéro-américain ? Pensez-vous que le contexte culturel influe sur l’interprétation qu'on donne au film ?
Les réactions sont globalement très positives. Le public tend à être ému à la fin du film. Sur les réseaux sociaux aussi, depuis le mois d’août, les commentaires des gens qui ont vu le film sur les plateformes sont très positifs. Par ailleurs, le film déclenche un débat, et nous en sommes ravis.

Le contexte culturel influe sur le film, bien sûr, mais le fait que toute femme se retrouve tôt ou tard face à la décision de devenir mère ou pas est transversal. Dernièrement, nous sommes allés au festival International Images, au Zimbabwe, et l’accueil réservé au film a été tout aussi intense, et les questions posées après la séance ressemblaient beaucoup à celles que nous avions entendues ailleurs. Je crois que le sujet qui varie le plus selon le contexte culturel est l’avortement, un acte tellement politisé et utilisé comme arme à pointer sur les autres qu'il paraît contaminé et recouvert de nombreuses couches culturelles. Je serais ravie que le public ibéro-américain aime le film. Mamífera est un film lumineux et triste, c’est un voyage, et j’adorerais que le public voyage avec lui. Et si en plus, en sortant, il se dit que la décision de ne pas être mère est tout aussi "naturelle" ou "normale" que celle de ne pas l’être, eh bien le succès sera complet.

Mamífera est un récit introspectif qui adopte une approche presque documentaire. Quels challenges le choix de cette esthétique représentait-il et comment a-t-il influé sur votre travail artistique ainsi que sur votre relation avec vos acteurs et l’équipe de production ?
Je voulais que Mamífera reflète une réalité, un contexte socioculturel présent dans nos vies, et pour ce faire, il fallait choisir la bonne maison et le bon quartier pour chaque personnage, etc. Il fallait construire le film à partir du réel et nous adapter à lui. Par exemple, Lola et Bruno vivent dans un quartier ouvrier traditionnel où aucune structure n'existait pour les équipes de tournage, mais il était nécessaire d'aller là pour le film. Idem pour l’appartement des personnages principaux : je voulais que ce soit un petit appartement typique de Montbau [un quartier de Barcelone]. Cela supposait de réduire l’équipe de tournage, parce que nous n'entrions pas tous, et d'expliquer à l’équipe comment nous allions nous organiser là-dedans, surtout qu'on avait des enfants et une chienne aveugle...

Quant à la méthode de travail, nous avons toujours tourné le strict nécessaire voire moins. Le fait que nous ayons répété avant avec les acteurs nous a beaucoup aidé. Notre manière de concevoir ce film a toujours privilégié le naturel et la sobriété. C'est pour ça que nous avons choisi une planification qui nous rapproche du réalisme calmement, sans acrobaties.

(Traduit de l'espagnol)

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